« La forêt vosgienne telle qu’on la voit sera différente » à la fin du siècle car elle souffre de multiples maux qui fragilisent son équilibre : des sécheresses répétées et le scolyte, un insecte ravageur.
Le scolyte est un minuscule coléoptère brun qui « profite de la faiblesse des arbres affectés par la sécheresse pour se développer » explique Pierre Lambert, de l’unité territoriale Meurthe-Galilée de l’Office national des forêts (ONF).
L’animal pond ses oeufs en perçant l’écorce des arbres fragilisés. Les larves grandissent en puisant leur énergie dans le bois ainsi grignoté et colonisent de nouveaux arbres au fur et à mesure.
« Il faut détecter les arbres en train d’être colonisés et les évacuer avant que les adultes ne sortent et essaiment. Quand l’arbre est sec, c’est trop tard », explique Rodolphe Pierrat, de l’agence de Mulhouse de l’ONF.
Malheureusement l’invasion est gigantesque et peine à être freinée. Quelque 200.000 m3 de bois sont déjà touchés, notamment l’épicéa.
Les canicules s’accumulant et le manque de précipitations entraînent des perturbations chez toutes les espèces (sapins, hêtres, pins, …) qui ont besoin d’eau. Alors, les arbres s’adaptent en perdant leurs aiguilles, leurs feuilles ou leurs branches.
Le massif dévoile des arbres déjà morts ou en train de mourir.
Le manque d’eau
« Ce qui nous inquiète, ce n’est pas d’avoir une sécheresse importante de temps en temps, mais que les années chaudes se succèdent: 2015, 2018, 2019 et 2020 », énumère M. Pierrat. « Normalement, ici, c’est le royaume de la forêt: il pleut tout le temps, il fait humide ».
« Depuis trois ou quatre ans, les arbres sont en état de stress hydrique », ajoute M. Lambert.
Peu importe les prévisions, « on va prendre 1 degré supplémentaire dans le massif d’ici à 2050. Au-delà de 2° ou 3°, l’épicéa va souffrir le plus rapidement. Ensuite ce sera le sapin, puis le hêtre. Même le chêne sessile sera en difficulté », prédit M. Pierrat.
« Notre stratégie est de miser sur la régénération naturelle de la forêt et de diversifier les essences: si par exemple l’épicéa est en difficulté, d’autres essences pourront continuer à structurer le peuplement ». M. Pierrat raconte planter en petites quantités des espèces plus habituées aux températures plus élevées afin d’étudier leurs capacités d’adaptation : pin larriccio de Corse, chêne des Canaries, noisetier de Byzance des Balkans ou cyprès d’Arizona.
Les forêts reflètent déjà les premiers effets des changements climatiques de ces dernières décennies.