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Ray Dalio : « Ce n’est pas une récession, c’est un effondrement. […] Il y aura un nouvel ordre mondial »

Ray Dalio : "Ce n'est pas une récession, c'est un effondrement. [...] Il y aura un nouvel ordre mondial"

Lors d’un entretien pour TED, le milliardaire Ray Dalio a comparé la crise économico-sanitaire du coronavirus à un tsunami. Le fondateur de Bridgewater Associates, l’un des plus importants fonds d’investissement au monde, a fait état d’un effondrement qui débouchera sur un nouvel ordre mondial.

Ray Dalio a comparé notre épode à la période post « Grande Dépression » de 1929 qui a débouché sur une extrême pauvreté et d’importantes inégalités qui ont permis l’arrivée au pouvoir en Allemagne d’Adolf Hitler. Il apporte une critique intéressante sur les dérives du capitalisme. La rédaction Issues.fr vous propose un résumé de cet entretien passionnant.

Bretton Woods et Nouvel Ordre Mondial

Il y a quatre choses qui sont les forces motrices de notre économie, de notre mode de vie et de notre richesse. La première et la plus importante est la productivité qui vient des gens (apprendre, inventer, bien faire les choses). La croissance est lente. 1 à 3 % par an car il n’y a pas de volatilité car la connaissance n’est pas volatile. C’est lent mais cela améliore notre niveau de vie.

Puis il y a un cycle de l’endettement à court terme qui dure environ 8-10 ans. Et il y a un cycle de la dette à long terme, 50-75 ans, après lequel vous commencez un nouveau type d’argent et de crédit.

Le dernier ordre mondial a débuté à la fin de la Seconde Guerre Mondiale en 1945 avec le système monétaire de Bretton Woods. Ce nouvel ordre mondial qui était américain et que l’on a connu et qui représente encore 70 % du monde de la monnaie et du crédit fonctionne avec le dollars américain. Et vous avez traditionnellement une rupture.

Politique intérieure et extérieure

La quatrième influence est la politique – comment nous traitons les uns avec les autres. La politique intérieure et internationale. Et la question est de savoir comment vous gérez l’écart de richesse, les divergences de valeurs. Avons-nous une mission commune, avons-nous un rêve américain sur lequel nous pouvons nous mettre d’accord et nous poursuivons ce rêve ensemble ou vous vous battez pour la richesse et ainsi de suite. Et lorsque vous regardez l’histoire, voilà ce que sont les révolutions avec des formes différentes. Des fois elles sont pacifiques ou violentes mais au final il y a un changement. Roosevelt a changé les politiques, les impôts et ainsi de suite. Hitler est arrivé au pouvoir à cause de ces inégalités.

Les tests de stress ont lieu tous les 75 ans. Cette fois, les pays se réuniront-ils pour le plus grand bien ou se battront-ils ?

Une Dépression Mondiale

Si vous évoquez une situation comme la période 1929-1932, avec une chute de l’économie où le taux de chômage était à deux chiffres, avec une chute de 10 % de l’économie. Oui nous sommes dans la même configuration ».

À l’époque, comment ont-ils fait face à cette situation ? En 1933, ils ont imprimé beaucoup d’argent. Des programmes similaires à ceux d’aujourd’hui. Taux d’intérêt à 0. Même chose qu’aujourd’hui : expansion du crédit/de l’argent. Il a fallu beaucoup de temps pour que le marché boursier dépasse les anciens sommets et que l’économie retrouve ses niveaux antérieurs ? Un long moment. Ce n’est pas une récession, c’est un effondrement du fonctionnement de l’argent et du crédit ».

La journaliste demande ensuite si des mesures d’austérité, des politiques d’impôts, la redistribution des richesses et l’impression de monnaie vont être utilisées pour sortir de la crise.

Nous verrons l’impression de l’argent et la redistribution. Il faut miser sur la plus grande force de l’homme qui est la créativité et l’adaptation de l’homme. Nous allons nous en sortir, ce sera un petit déhanchement sur la ligne de la croissance, comme ce à quoi ressemblent les anciennes dépression quand on fait un zoom sur le passé », a expliqué le milliardaire.

Il y aura un nouvel ordre mondial mais il passera et sera réinventé parce que ce que nous traitons actuellement n’est que de l’argent et du crédit.

L’argent et le crédit ne sont que numériques, juste de la comptabilité. Nous assisterons à une gigantesque restructuration des reconnaissances de dette. Qui paiera pour les maintenir en vie ? Il faudra quelques années pour connaître les chiffres. L’important est de savoir qui encaisse les chèques, qui va survivre. Ensuite, nous aurons un nouvel environnement de travail. Il sera plus sain.

La crise de 2020 bien pire que celle de 2008

C’est plus important que ce qui s’est passé en 2008. À l’époque, nous étions capables de maintenir en vie des banques d’importance systémique en leur accordant des crédits. Cette fois-ci, c’est l’économie réelle, celle qui se trouve au-delà des banques. La crise est plus grave et nous avons une politique monétaire moins efficace (les taux étaient plus bas à l’époque). Le simple achat d’actifs financiers ne fonctionnera pas cette fois-ci. Il faut faire parvenir l’argent à ceux qui en ont besoin.

Mondialisation et isolationnisme…

« Nous allons certainement nous retirer de la mondialisation. Venons-en aux questions pratiques. La réalité est que beaucoup de populations ne seront pas aidées. La vulnérabilité d’un pays est l’opportunité d’un autre pays. Comment résoudre les conflits sur qui reçoit quoi ? Nous sommes dans un monde interconnecté mais fragmenté. Puis-je compter sur quelqu’un d’autre pour me donner ce dont j’ai besoin, ou ne pas profiter de moi ? Non, plus maintenant.

Cette séparation/isolement des États-Unis par rapport au reste du monde a commencé avant que nous ayons cette crise du Covid-19. Lisez l’histoire. En ce moment, les Chinois apportent leur aide pour les choses qui sont nécessaires dans cette crise. Mais même en disant cela, c’est un défi politique. Notre monde est tellement fragmenté qu’il est difficile de remercier les pays et les entreprises qui nous aident. En ce moment, il y a une diabolisation des différents peuples. La manière dont nous nous en sortons dépend de notre comportement les uns envers les autres.

Au sujet du capitalisme…

Voulons-nous les résultats que nous obtenons et que le système produit ? L’ordre mondial actuel a été créé à Bretton Woods en 1945. Environnement d’égalité des chances, rêve américain, harmonie, etc. Vous avez vu l’effondrement, les affrontements, les combats, suivis de nouveaux systèmes.

L’idée que le système de profit n’est pas juste. Les ressources sont allouées à ceux qui ont déjà des ressources. Tous les systèmes fonctionnent pour ceux qui contrôlent le système – il se perpétue de lui-même. Par exemple, aux États-Unis, les 40 % les plus riches dépensent en moyenne 5 fois plus pour l’éducation des enfants que les 60 % les plus pauvres.

Je suis un capitaliste, je crois que nous pouvons augmenter la taille du gâteau et bien le diviser. Mais il faut réformer et restructurer, c’est ce qui se passe actuellement.

L’éducation…

L’éducation est un grand investissement, plus les gens sont bien éduqués, plus la productivité sera élevée. Mais les États et les localités la considèrent comme une question budgétaire – une dépense. Ce n’est pas la bonne façon de penser l’éducation. Elle doit être bien conçue. Le système doit être perçu comme équitable. Je suis pessimiste à 60/40 sur le fait que nous ne serons pas assez bons pour le faire bien.

Un système plus équitable…

Ce sont eux les héros (soignants, travailleurs avec des bas salaires), c’est certain. Mais il faut que tout le monde y adhère, les PDG et les travailleurs en première ligne. Nous devons établir qu’il y a un niveau de base (éducation, soins de santé, fondamentaux) en-dessous duquel on ne peut pas descendre, sinon il n’y a pas d’opportunité, et le coût est le crime et les incarcérations.

Notre travail consiste à faire en sorte que les enfants passent le cap du lycée et trouvent un emploi : nous ferons des économies. Le coût moyen d’une incarcération est de 40 à 120 000 dollars par an. La différence entre un étudiant riche et un étudiant pauvre est de savoir qui peut avoir un ordinateur et apprendre. En leur donnant un emploi, on économise beaucoup d’argent. Les philanthropes ne peuvent pas y arriver seuls : les sommes sont trop élevées.

Sur la prise de décision des gens puissants

Vous devez réaliser que très peu de gens prennent des décisions basées sur la qualité de l’argument. La plupart des gens ont un objectif ou sont dans une sorte de guerre, et ils sont d’un seul côté. Ils prennent donc leurs décisions en fonction de leur camp plutôt que sur la base d’arguments de qualité. Tout est politiquement difficile – le nombre de respirateurs, etc. Les gens des autres camps en tireront profit.

Nous allons nous en sortir. Nous avons la possibilité d’apporter des changements, de faire mieux et d’en sortir plus forts. Nous pouvons améliorer les structures, mais nous avons besoin d’une coopération active. C’est un moment décisif.

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