En Alsace, les hôpitaux sont déjà débordés par l’arrivée massive de malades. Selon le journal Le Parisien, les soignants ont déjà commencé à trier les patients faute de place dans les services de réanimation.
A Mulhouse, l’un des foyers français du coronavirus, le manque de places en réanimation pousse les soignants à renoncer à intuber certains patients de l’âge de 70 ans, déjà malades. Dans l’hôpital, une infirmière épuisée avoue la voix triste : « Oui, on commence à trier les patients. »
Les soignants expliquent que face au manque de lits en réanimation, ils sont obligés de faire un tri entre les patients selon leur âge, leur état de santé et leurs antécédents médicaux.
« C’est comme en médecine de guerre, il va falloir faire des choix. Ce sera en fonction de l’âge ou de l’état de santé. »
Dans l’Est de la France tout comme à Paris, les médecins font des choix douloureux pour assurer le maximum de soins possibles.
« Nous avons dû prendre cette décision pour une personne de 70 ans qui souffrait d’autres maladies et parce que nous n’avions pas assez de place », poursuit Delphine, une infirmière interrogée par le Parisien.
« C’est dur, c’est très dur, souffle-t-elle. On n’est pas là pour ça. »
Le personnel soignant s’inquiète face à l’arrivée des premières vagues de malades. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur les prochains jours qui seront encore plus intenses.
« Je pense à une personne de 70 ans, avec des comorbidités (NDLR : déjà malade), qui n’a pas été intubée, concède Philippe. 70 ans, ce n’est pas vieux ! Si aujourd’hui on ne réanime pas des gens de cet âge, qu’est-ce que ça sera dans une semaine ? »
Le soignant précise que les antécédents médicaux du malade étaient importants et rien ne dit que des semaines en réanimation aurait suffi à le sauver. Il aurait occupé une place qui aurait pu servir à un plus jeune, en meilleur santé, dont les chances de survie sont plus importantes.
Philippe est gêné quand on lui demande si ce tri des patients est arrivé plusieurs fois. Il avoue que oui mais reste vague sur la question.
« C’est arrivé pour plusieurs patients. On n’a pas le droit de vous parler mais, si on le fait, si on se mouille, c’est parce qu’il ne faut pas prendre cette épidémie à la légère. Elle est très grave, j’ai peur pour mes proches, j’espère vraiment qu’ils ne vont pas choper ce truc, précise Delphine. Les pronostics en réanimation ne sont pas très bons. »
La maladie n’est pas la seule responsable de ces choix dramatiques. Les soignants doivent faire des miracles avec très peu de matériel.
« On a besoin de plus de respirateurs. […] Il nous faut plus de matériel. Des malades, y compris des jeunes, décompensent en moins de vingt-quatre heures. »
Les personnels hospitaliers craignent un scénario à l’italienne. Les responsables d’équipe se préparent, organisent des salles de réanimation, augmentent le nombre de lits mais tout le monde sait que cela restera insuffisant.
« En Ile-de-France, on essaie de doubler voire de tripler notre nombre de lits en réanimation. »
Chaque journée qui passe rapproche les médecins du pic de la pandémie. Tous savent qu’ils ne pourront compter que sur eux-mêmes et devront se décupler pour s’occuper des patients malades.
Les parisiens ont réalisé une action symbolique hier en applaudissant depuis leur balcon les personnels soignants qui travaillent chaque jour pour sauver des vies. Un petit geste pour soutenir le moral des personnels hospitaliers déjà épuisés psychologiquement par le manque de moyen pour se protéger face au virus.
LIRE AUSSI : Coronavirus. Les médecins sont furieux, la France aurait envoyé son stock stratégique de masques FFP2 en Chine
LIRE AUSSI : Patrick Pelloux (médecin urgentiste) : “15 millions de personnes pourraient être contaminées” en France