Depuis plus d’un an, les personnels soignants français se battent pour obtenir plus de moyens dans l’hôpital public. En première ligne face au coronavirus, ils vont devoir tenter de sauver les patients contaminés avec le peu de moyens à leur disposition.
Gaël Giraud, économiste français et ancien chef économiste de l’Agence française de développement, revient sur les politiques françaises d’austérité qui ont conduit à l’abandon de l’hôpital public. Il rappelle que le réchauffement climatique va provoquer une multiplication des virus et épidémies dans des zones jusqu’ici épargnées.
Texte publié sur le Facebook de Gaël Giraud :
Je suis actuellement à Rome où je travaille au Centro Astalli, qui accueille et soigne des réfugiés du monde entier. Pour l’instant pas de cas de coronavirus confirmé, mais au vu de la viralité du pathogène, ça ne saurait tarder.
Je constate que le pire est en train d’arriver en France : des Français sont dépistés positifs au coronavirus, après plusieurs jours d’hospitalisation pendant lesquels ils ont pu à loisir disséminer le virus à des patients fragiles. Certains soignants sont renvoyés chez eux, certains services ferment dans l’Oise, à Creil, à Compiègne et à Paris. Même si le coronavirus ne devient pas une pandémie (ce qu’il faut souhaiter), la démonstration est faite que nous ne sommes nullement préparés à une pandémie. La raison de cette incurie ? Plusieurs décennies de néo-libéralisme qui ont conduit à l’abandon de l’hôpital public et, depuis trois ans maintenant, à sa destruction systématique. Les personnels hospitaliers français n’ont pas attendu le coronavirus pour descendre dans la rue et réclamer plus de moyens. Tout ce qu’ils ont reçu, ce sont des balles LBD, des flash-balls et des gaz lacrymogènes mêlés à d’autres substances sur lesquelles l’État interdit d’enquêter. Le gouvernement actuel va porter une responsabilité écrasante dans les morts que provoquera le coronavirus en France, soit directement, soit à travers la désorganisation de notre service hospitalier qu’il risque de provoquer.
Tout ceci est d’autant plus inquiétant que nous savons depuis longtemps que les pandémies vont se multiplier par le réchauffement climatique. Les maladies tropicales « remontent » de l’équateur vers les pôles. La malaria s’est déjà réinstallée au sud de l’Italie il y a deux ou trois ans. La Banque Mondiale évalue à 5 milliards le nombre de personnes qui seront infectées par la malaria en 2050, c’est-à-dire demain.
Sommes-nous préparés à ce que plus d’un Français sur deux puisse mourir demain d’une crise de paludisme ? Si nous laissons l’actuel gouvernement continuer de détruire l’hôpital public en France, la réponse est clairement non. J’ai contracté la malaria au Tchad, il y a vingt ans, et je sais ce que c’est qu’une crise de palud. Je ne souhaite cela à personne en France.