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Le virus qui a infecté les premiers animaux il y a des centaines de millions d’années est essentiel au développement des embryons

SciTechDaily

Les chercheurs du CNIO ont découvert le rôle essentiel des rétrovirus endogènes dans le développement embryonnaire, notamment dans le passage de la totipotence à la pluripotence. Cette étude, qui remet en question la notion précédente d’« ADN indésirable », met en lumière la relation symbiotique entre les gènes viraux et le développement embryonnaire précoce, avec des implications pour la médecine régénérative. Crédit : Issues.fr.com

  • Au moins 8 % du génome humain est constitué de matériel génétique provenant de virus. C’était considéré comme de la « cochonnerie » ADN » jusqu’à récemment, mais son rôle dans le développement humain est désormais reconnu comme étant essentiel
  • Des chercheurs du Centre national espagnol de recherche sur le cancer (CNIO) décrivent pour la première fois le rôle de ces virus dans un processus clé du développement, lorsque les cellules deviennent pluripotentes quelques heures après la fécondation.
  • La découverte, publiée dans Avancées scientifiquesest pertinent pour la médecine régénérative et pour la création d’embryons artificiels

Tous les animaux ont évolué grâce au fait que certains virus ont infecté des organismes primitifs il y a des centaines de millions d’années. Le matériel génétique viral a été intégré au génome des premiers êtres multicellulaires et figure encore aujourd’hui dans notre ADN. Des chercheurs du CNIO (Centre National Espagnol de Recherche sur le Cancer) décrivent maintenant dans la revue Avancées scientifiques pour la première fois le rôle joué par ces virus dans un processus absolument vital pour notre développement, et qui se produit quelques heures après la fécondation : le passage à la pluripotence, lorsque l’ovocyte passe de deux à quatre cellules.

Avant cette étape, chacune des deux cellules de l’embryon est totipotente, c’est-à-dire qu’elle peut se développer à l’intérieur d’un organisme indépendant ; les quatre cellules de l’étape suivante ne sont pas totipotentes mais pluripotentes, car elles peuvent se différencier en cellules de n’importe quel tissu spécialisé du corps.

Pour Sergio de la Rosa et Nabil Djouder, respectivement premier auteur et auteur principal, cette découverte est pertinente pour le domaine de la médecine régénérative et de la création d’embryons artificiels, car elle ouvre une nouvelle façon de générer écurie lignées cellulaires dans les phases de totipotence. Djouder dirige le groupe Facteurs de croissance, nutriments et cancer au CNIO.

Nous sommes 8% de rétrovirus

Le matériel génétique des « rétrovirus endogènes » a été intégré dans le génome d’organismes qui pourraient avoir été à l’origine de l’explosion cambrienne, une période il y a plus de 500 millions d’années au cours de laquelle les mers du monde ont connu une biodiversité boom. Au cours de la dernière décennie, il a été constaté que les séquences génétiques de ces virus constituent au moins 8 à 10 % du génome humain.

« Jusqu’à récemment, ces restes viraux étaient considérés comme de l' »ADN indésirable », du matériel génétique inutilisable, voire nocif », explique De la Rosa. « Intuitivement, on pensait qu’avoir des virus dans le génome ne pouvait pas être une bonne chose. Cependant, ces dernières années, nous commençons à réaliser que ces rétrovirus, qui ont co-évolué avec nous pendant des millions d’années, ont des fonctions importantes, comme la régulation d’autres gènes. C’est un domaine de recherche extrêmement actif.

Nabil Djouder

Nabil Djouder, responsable du groupe Facteurs de croissance, nutriments et cancer au CNIO. Crédit : Antonio Tabernero / CNIO

Le passage de la totipotence à la pluripotence, une question de rythme

La recherche publiée dans Avancées scientifiques montre que le rétrovirus endogène MERVL donne le ton au développement de l’embryon, notamment lors de l’étape spécifique de transition de la totipotence à la pluripotence, et explique le mécanisme qui permet que cela se produise.

« Il s’agit d’un rôle totalement nouveau pour les rétrovirus endogènes », explique Djouder. « Nous avons découvert un nouveau mécanisme qui explique comment un rétrovirus endogène contrôle directement les facteurs de pluripotence. »

Ce nouveau mécanisme d’action implique l’URI, un gène que le groupe de Djouder étudie en profondeur. Il y a des années, on a découvert que si l’URI était supprimé chez les animaux de laboratoire, les embryons ne pouvaient même pas se développer. De la Rosa voulait savoir pourquoi et comment son lien avec le rétrovirus MERVL avait été découvert.

Une transition en douceur

Les résultats montrent que l’une des fonctions de l’URI est de permettre l’action de molécules essentielles à l’acquisition de la pluripotence ; si l’URI n’agit pas, les facteurs de pluripotence non plus, et la cellule reste dans un état de totipotence. Il s’agit d’une protéine endogène de rétrovirus, MERVL-gag, qui module l’action de l’URI.

Les chercheurs ont découvert que pendant la phase de totipotence, lorsqu’il n’y a que deux cellules dans l’ovocyte, l’expression de la protéine virale MERVL-gag est élevée ; cette protéine se lie à l’URI et l’empêche d’agir. Cependant, les niveaux changent progressivement, de sorte que les niveaux de protéine virale MERVL-gag diminuent et que l’URI peut entrer en action : la pluripotence apparaît.

Comme l’explique De la Rosa : « La transition se fait en douceur. Lorsqu’il y a une forte expression de protéine virale, il y a moins de facteurs de pluripotence ; à mesure que l’expression de l’ERV diminue, l’URI stabilise ces facteurs.

Coévolution symbiotique

« Nos résultats révèlent une coévolution symbiotique des rétrovirus endogènes avec leurs cellules hôtes afin de garantir la progression douce et rapide du développement embryonnaire précoce », expliquent les auteurs dans Avancées scientifiques.

En d’autres termes, la relation à trois voies entre la protéine virale, l’URI et les facteurs de pluripotence est finement modulée, « pour laisser suffisamment de temps à l’embryon pour s’ajuster et coordonner la transition en douceur de la totipotence à la pluripotence et la spécification de la lignée cellulaire au cours du développement embryonnaire ». » conclut Djouder.

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