Dr Hanan Herzig Sheinfux, de l’Université Bar-Ilan : « Ce qui a commencé comme une découverte fortuite pourrait bien ouvrir la voie à de nouvelles applications quantiques, repoussant les limites de ce que nous pensions possible. »
Dans le cadre d’un grand pas en avant pour la nanophotonique quantique, une équipe de physiciens européens et israéliens introduit un nouveau type de cavités polaritoniques et redéfinit les limites du confinement de la lumière. Ce travail pionnier, détaillé dans une étude publiée aujourd’hui (6 février) dans Matériaux naturels, démontre une méthode non conventionnelle pour confiner les photons, surmontant les limites traditionnelles de la nanophotonique.
Les physiciens cherchent depuis longtemps des moyens de regrouper les photons dans des volumes de plus en plus petits. L’échelle de longueur naturelle du photon est la longueur d’onde et lorsqu’un photon est forcé dans une cavité beaucoup plus petite que la longueur d’onde, il devient effectivement plus « concentré ».
Cette concentration améliore les interactions avec les électrons, amplifiant les processus quantiques au sein de la cavité. Cependant, malgré un succès significatif dans le confinement de la lumière dans des volumes profonds inférieurs à la longueur d’onde, l’effet de dissipation (absorption optique) reste un obstacle majeur.
Les photons dans les nanocavités sont absorbés très rapidement, bien plus rapidement que la longueur d’onde, et cette dissipation limite l’applicabilité des nanocavités à certaines des applications quantiques les plus passionnantes.
Conception innovante de nanocavité
Le groupe de recherche du professeur Frank Koppens de l’ICFO à Barcelone, en Espagne, a relevé ce défi en créant des nanocavités offrant une combinaison inégalée de volume inférieur à la longueur d’onde et de durée de vie prolongée.
Ces nanocavités, mesurant moins de 100 x 100 nm² de superficie et seulement 3 nm d’épaisseur, confinent la lumière pendant des durées beaucoup plus longues. La clé réside dans l’utilisation de polaritons à phonons hyperboliques, des excitations électromagnétiques uniques se produisant dans le matériau 2D formant la cavité.
Contrairement aux études précédentes sur les cavités à base de polaritons de phonons, ce travail utilise un nouveau mécanisme de confinement indirect. Les nanocavités sont réalisées par forage à l’échelle nanométrique trous dans un substrat en or avec la précision extrême (2-3 nanomètres) d’un microscope à faisceau ionique focalisé sur He.
Après avoir réalisé les trous, du nitrure de bore hexagonal (hBN), un matériau 2D, est transféré dessus. Le hBN prend en charge des excitations électromagnétiques appelées polaritons à photons hyperboliques qui sont similaires à la lumière ordinaire, sauf qu’elles peuvent être confinées à des volumes extrêmement petits.
Lorsque les polaritons passent au-dessus du bord du métal, ils subissent une forte réflexion de celui-ci, ce qui leur permet d’être confinés. Cette méthode évite ainsi de façonner directement le hBN et préserve sa qualité vierge, permettant des photons hautement confinés ET à longue durée de vie dans la cavité.
Succès expérimental surprenant
Cette découverte a commencé par une observation fortuite réalisée au cours d’un autre projet lors de l’utilisation d’un microscope optique en champ proche pour numériser des structures matérielles en 2D. Le microscope à champ proche permet d’exciter et de mesurer des polaritons dans la gamme infrarouge moyenne du spectre et les chercheurs ont remarqué une réflexion inhabituellement forte de ces polaritons depuis le bord métallique. Cette observation inattendue a déclenché une enquête plus approfondie, conduisant à la réalisation du mécanisme de confinement unique et de sa relation avec la formation des nanorayons.
Cependant, lors de la fabrication et de la mesure des cavités, l’équipe a eu une énorme surprise. « Les mesures expérimentales sont généralement pires que ce que la théorie suggère, mais dans ce cas, nous avons constaté que les expériences ont surpassé les prédictions théoriques simplifiées et optimistes », a déclaré le premier auteur, le Dr Hanan Herzig Sheinfux, du département de physique de l’université Bar-Ilan.
« Ce succès inattendu ouvre la porte à de nouvelles applications et avancées en photonique quantique, repoussant les limites de ce que nous pensions possible. »
Le Dr Herzig Sheinfux a mené la recherche avec le professeur Koppens pendant son stage postdoctoral à l’ICFO. Il a l’intention d’utiliser ces cavités pour observer des effets quantiques que l’on pensait auparavant impossibles, ainsi que pour approfondir l’étude de la physique intrigante et contre-intuitive du comportement des polaritons des phonons hyperboliques.