En 1960, Luttinger a proposé un principe universel reliant la capacité totale d’un système pour les particules à sa réponse aux excitations de faible énergie. Bien que facilement confirmé dans les systèmes à particules indépendantes, ce théorème reste applicable dans les systèmes quantiques corrélés caractérisés par d’intenses interactions inter-particules.
Cependant, et c’est assez surprenant, il a été démontré que le théorème de Luttinger échoue dans des cas très spécifiques et exotiques de phases de la matière fortement corrélées. L’échec du théorème de Luttinger et ses conséquences sur le comportement de la matière quantique sont au cœur d’intenses recherches en physique de la matière condensée.
Les isolants invariants et corrélés d’Ishikawa-Matsuyama
Indépendamment de ces développements, d’importants efforts ont été consacrés à la classification et à la caractérisation des états isolants corrélés de la matière. Dans ce contexte, il a été montré qu’une large classe d’isolants topologiques peut être étiquetée par un seul entier, connu sous le nom d’invariant d’Ishikawa-Matsuyama, qui capture pleinement ses propriétés de transport.
Ce résultat constitue une étape importante car il offre une prescription simple pour classer les états isolants en présence d’interactions fortes. Cependant, très récemment, des théoriciens ont identifié des modèles exotiques d’isolants corrélés qui échappent mystérieusement à cette classification attrayante : des corrections de l’invariant d’Ishikawa-Matsuyama sont donc nécessaires dans des contextes particuliers.
Lien entre le théorème de Luttinger et la classification des états isolants
Écrire dans le prestigieux Lettres d’examen physique, Lucila Peralta Gavensky et Nathan Goldman (ULB), ainsi que Subir Sachdev (Harvard), révèlent que l’échec du théorème de Luttinger et la classification des états isolants de la matière sont liés par une relation fondamentale. Essentiellement, ces auteurs démontrent que l’invariant d’Ishikawa-Matsuyama caractérise pleinement les isolants corrélés lorsque le théorème de Luttinger est satisfait.
En revanche, cet invariant topologique s’avère insuffisant pour étiqueter les phases corrélées dès que le théorème de Luttinger est violé, et les auteurs fournissent des expressions explicites pour les corrections requises en termes de grandeurs physiques pertinentes.
Ce lien important entre le théorème de Luttinger et la classification topologique de la matière quantique met en lumière l’émergence de phénomènes exotiques dans la matière quantique fortement corrélée.