Après plus de deux décennies de recherches pionnières sur la magnétosphère terrestre et la météorologie spatiale, la mission Cluster de l’ESA touche à sa fin, avec la rentrée du premier satellite, « Salsa », prévue en septembre 2024.
La mission Cluster de l’ESA, qui a passé 24 ans à révéler les secrets de l’environnement magnétique terrestre, touche à sa fin.
Le premier des quatre satellites du quatuor Cluster, baptisé « Salsa », rentrera dans l’atmosphère terrestre en septembre 2024.
Récemment, les opérateurs d’engins spatiaux ont effectué une série de manœuvres pour garantir que cette rentrée se déroulera au-dessus d’une région peu peuplée du Pacifique Sud.
La fin de la mission Cluster offre une rare opportunité d’étudier la rentrée atmosphérique en toute sécurité de quatre satellites identiques dans des conditions différentes.
La mission du cluster vétéran touche à sa fin
Lancé en 2000, Cluster est une constellation unique de quatre vaisseaux spatiaux identiques étudiant l’interaction entre le Soleil et la magnétosphère terrestre – notre bouclier contre le gaz chargé, les particules énergétiques et le champ magnétique provenant de notre étoile.
Malgré une durée de vie prévue de deux ans, la mission Cluster a désormais passé près de 24 ans en orbite.
Au cours des deux dernières décennies et demie, les observations de Cluster ont conduit à la publication de plus de 3 200 articles scientifiques et ce n’est pas fini.
Ils ont fourni aux scientifiques des informations essentielles sur l’impact du Soleil sur l’environnement terrestre et les processus qui se déroulent dans la magnétosphère terrestre, et ont amélioré notre compréhension des conditions météorologiques spatiales potentiellement dangereuses.
La connexion Soleil-Terre reste un sujet d’étude important, en particulier dans la période actuelle de forte activité solaire.
Les satellites Cluster continueront leurs observations jusqu’en septembre 2024. Au cours de leurs derniers mois d’activité scientifique, ils traverseront la région dans laquelle les particules chargées sont accélérées avant de produire les aurores boréales. Les chercheurs profiteront de la rare opportunité d’étudier cette région en utilisant des instruments sur plusieurs satellites en même temps.
Les décennies de données stockées dans les archives scientifiques du Cluster continueront de permettre de nouvelles recherches scientifiques longtemps après la fin de la mission. Grâce à ce trésor de données, les chercheurs peuvent revisiter et réanalyser des événements passés, mener de nouvelles analyses statistiques et mettre en œuvre de nouvelles apprentissage automatique et les techniques d’intelligence artificielle.
Les dernières étapes de la salsa
Des quatre satellites du Cluster (nommés Rumba, Salsa, Samba et Tango), Salsa sera le premier à replonger dans l’atmosphère terrestre.
Les opérateurs du centre de contrôle de mission ESOC de l’ESA ont effectué quatre manœuvres en janvier pour abaisser l’orbite de Salsa et préparer le satellite à une rentrée atmosphérique en toute sécurité en septembre au-dessus d’une région peu peuplée de l’océan Pacifique Sud.
« Les satellites Cluster ont des orbites très excentriques qui sont fortement influencées par l’attraction gravitationnelle du Soleil et de la Lune », explique Bruno Sousa, responsable des opérations de mission du système solaire intérieur à l’ESOC. « Parfois, ils chutent fortement, de plus de 30 km sur une seule orbite. D’autres fois, ils ne baissent pas du tout.
« Ce mois-ci, nous avons modifié l’orbite de Salsa pour nous assurer qu’elle connaisse sa dernière chute abrupte d’une altitude d’environ 110 km à 80 km en septembre. Cela nous donne le plus grand contrôle possible sur l’endroit où le vaisseau spatial sera capturé par l’atmosphère et commencera à brûler. »
Le timing des manœuvres était important. La « saison des éclipses » de la salsa commence en février. Le satellite passera la majeure partie des prochains mois éteint, alors qu’il se trouvera dans l’ombre de la Terre et incapable de compter sur ses panneaux solaires pour produire de l’électricité.
« Les panneaux solaires de Salsa se dégradent également rapidement depuis qu’ils ont traversé les ceintures de rayonnement de Van Allen. La puissance maximale disponible diminue rapidement et pourrait bientôt atteindre un point auquel nous serions incapables d’effectuer les manœuvres de désorbitation », explique Beatriz Abascal Palacios, ingénieure des opérations du cluster.
Chance unique d’améliorer la durabilité de l’espace
Les trois autres engins spatiaux du quatuor Cluster continueront d’effectuer des observations scientifiques, avec un accent particulier sur la physique des aurores, jusqu’en septembre. Salsa pourrait également participer à certaines observations finales, si elle est encore capable de générer suffisamment d’énergie après la saison des éclipses.
Comme beaucoup de nos satellites, le vaisseau spatial Cluster a été conçu et lancé avant l’entrée en vigueur des directives actuelles de l’ESA visant à limiter la création de débris spatiaux.
Néanmoins, l’ESA prend des mesures pour minimiser l’impact environnemental de ses anciennes missions. L’été dernier, nous avons guidé la mission éolienne de l’ESA, Aeolus, vers la Terre au-dessus de régions peu peuplées lors d’une première rentrée assistée de ce type. Grâce aux activités de ce mois-ci, la rentrée de Salsa en septembre aura lieu dans une région où la population, le trafic aérien et maritime sont tout aussi clairsemés.
Après la rentrée de Salsa, les satellites Cluster restants passeront en mode « gardien » – contrôlés, mais n’effectuant aucune nouvelle science – jusqu’à ce qu’eux aussi rentrent dans l’atmosphère terrestre de la même manière. La rumba réintégrera le pays en 2025 ; Tango et Samba réintégreront le groupe en 2026.
« C’est la première fois que quelqu’un cible de cette manière la rentrée d’un satellite avec une orbite excentrique comme Salsa », explique Stijn Lemmens du Bureau des débris spatiaux de l’ESA. « Et la fin de la mission Cluster nous donne une chance unique de rentrer dans quatre vaisseaux spatiaux identiques à des moments différents. »
« L’expérience que nous acquérons en rentrant en toute sécurité dans le même satellite sous quatre angles et vitesses différents, et dans quatre ensembles de conditions atmosphériques différentes, améliorera considérablement notre compréhension des rentrées et nous aidera à définir la norme pour l’élimination en toute sécurité des satellites sur des orbites similaires. »