L’intensification du réchauffement climatique a transformé les réseaux fluviaux canadiens de l’Extrême-Arctique pendant 60 ans, influencés par les cycles de gel-dégel et les modèles d’inondations. De nouvelles recherches soulignent le besoin urgent de modèles prédictifs pour prévoir les futurs changements environnementaux dans l’Arctique.
De nouvelles recherches codirigées par l’Université Simon Fraser et l’Université de la Colombie-Britannique montrent que l’amplification du réchauffement climatique dans l’Extrême-Arctique canadien a entraîné un profond changement dans la structure d’un réseau fluvial creusé dans un paysage de pergélisol en seulement 60 ans. Documentant une interaction puissante entre le changement climatique, la dynamique de gel-dégel d’un sol polygonal et l’apport d’eau de surface par les inondations ainsi que par la fonte des neiges et des glaces, l’équipe a développé une nouvelle vision des contrôles physiques régissant la vitesse et la configuration des rivières. canaliser le développement dans ces paysages fragiles.
Sol polygonal et débit d’eau
« L’un des processus clés que nous avons identifiés dans l’évolution des réseaux de cours d’eau est que leur développement est influencé par la façon dont l’eau s’écoule à travers des champs de polygones d’environ 10 mètres de large, créés par le gel et le dégel du sol dans les régions arctiques », explique Shawn Chartrand, professeur adjoint à l’École des sciences de l’environnement de l’Université Simon Fraser et auteur principal de la recherche publiée aujourd’hui (12 septembre) dans la revue Communications naturelles.
« Cette influence est également affectée par le moment, l’ampleur et la durée des inondations, ainsi que par le fait que les substrats de particules sédimentaires sous-jacents soient gelés ou partiellement gelés. »
Méthodologie de recherche et évolution du paysage
Chartrand fait partie d’une équipe de recherche internationale qui est arrivée sur l’île inhabitée d’Axel Heiberg au début de l’un des phénomènes de réchauffement estival les plus intenses jamais enregistrés. Leurs recherches sur le terrain se sont concentrées sur la vallée du boeuf musqué, à l’est de la calotte glaciaire Muller. Les chercheurs ont combiné des photographies aériennes de 1959 avec des observations sur le terrain et des données de pointe de détection et de télémétrie par la lumière (LiDAR) qu’ils ont collectées en 2019 pour comprendre comment le paysage de l’île Axel Heiberg a évolué sur une période de 60 ans.
Les effets d’entraînement du réchauffement
« Les processus physiques interconnectés peuvent approfondir les canaux fluviaux et étendre les réseaux fluviaux, créant ainsi plus de surface d’échange thermique, ce qui peut augmenter les taux locaux de dégel du pergélisol », explique Mark Jellinek, co-auteur de l’étude, professeur de sciences de la Terre, de l’océan et de l’atmosphère à l’université. de la Colombie-Britannique. « Ces effets en cascade peuvent accroître la libération de gaz à effet de serre dans l’Arctique à mesure que le carbone organique du sol dégèle et que le pergélisol recule. »
À l’aide des données LiDAR, l’équipe a produit un modèle numérique d’élévation (DEM) d’une section de 400 mètres de la vallée. «Grâce à la modélisation de la façon dont l’eau se déplace dans le paysage, nous avons constaté que les eaux de crue acheminées à travers des creux polygonaux interconnectés augmentent la probabilité d’érosion et de développement de canaux», explique Chartrand.
Influence de la température sur les inondations
Les inondations du lac de la vallée et la fonte saisonnière du manteau neigeux et de la glace souterraine contribuent à l’eau qui fusionne dans la vallée, créant ainsi les conditions du transport de sédiments grossiers et du développement de réseaux de canaux le long du fond de la vallée. Cependant, le moment des inondations au moment du dégel maximal peut influencer l’ampleur de l’érosion. «Le réchauffement de l’air joue ici un rôle», explique-t-il. « Nous prévoyons que l’érosion et le transport des sédiments sont sensibles au fait que les inondations se produisent avant ou après une période de températures de l’air élevées, car cela influence la profondeur à laquelle les substrats de particules sédimentaires sont dégelés, et donc le transport des particules par les eaux de crue. »
Regarder vers l’avenir : prédire les changements futurs
Les chercheurs affirment que le défi à l’avenir sera d’appliquer ces données pour produire des modèles physiques prédictifs qui aident à comprendre comment les réseaux fluviaux de l’Arctique évolueront au cours des prochaines décennies marquées à la fois par le réchauffement et l’intensification de la variabilité climatique. Ils soulignent une urgence accrue, car l’expansion des réseaux fluviaux transportera des charges plus importantes de sédiments ainsi que de nutriments et de métaux vers des bassins versants et des pêcheries fragiles, avec des conséquences potentiellement importantes sur la faune, les eaux et les populations côtières.
L’équipe de recherche comprenait également des scientifiques de l’Institut finlandais de recherche géospatiale, du Laboratoire de Planétologie et Géosciences (UMR CNRS 6112)Université de Western Ontario et Jet Propulsion Laboratory.