Un buffle africain dans la savane. Crédit : GENUS : DSI-NRF Centre d'excellence en paléosciences
De nouvelles découvertes de fossiles sur le site de Kromdraai en Afrique du Sud offrent des informations révolutionnaires sur les écosystèmes anciens et leur rôle dans l'évolution humaine, soulignant l'interaction entre les hominidés et divers bovidés espèces.
Dans les vastes savanes du berceau de l'humanité en Afrique du Sud, le site archéologique de Kromdraai a dévoilé une nouvelle découverte qui améliore considérablement notre compréhension des écosystèmes qui ont influencé l'évolution humaine.
Des chercheurs ont exhumé une collection de bovidés fossilisés, révélant la présence d'espèces jusqu'alors inconnues qui parcouraient autrefois ces anciennes prairies aux côtés de nos ancêtres hominidés. Cette découverte importante, détaillée dans une étude publiée dans Avis sur les sciences du Quaternairemet non seulement en évidence la biodiversité de l’ère plio-pléistocène, mais offre également des informations sans précédent sur les conditions environnementales qui ont influencé le développement des premières espèces humaines.
Parmi les découvertes notables figure une espèce inconnue de buffle de taille moyenne, soulignant la complexité des écosystèmes anciens et le rôle central que ces environnements ont joué dans le façonnement des voies évolutives des hominidés comme Paranthrope robuste et tôt Homo « La paléontologie évoque souvent l’image des dinosaures, mais l’étude des animaux modernes comme les bovidés est également cruciale. Les bovidés sont divers et prospères en Afrique, offrant un aperçu des écosystèmes anciens et modernes. Leur histoire évolutive est étroitement liée à la nôtre, car ils ont été un élément clé du paysage et des sociétés humaines depuis le Miocène, il y a environ 23 millions d’années », note le Dr Raphael Hanon, auteur principal et chercheur postdoctoral à l’Institut d’études évolutionnaires de l’Université de Witwatersrand.
Connaissances de l'ère plio-pléistocène
Cette découverte, menée par une équipe de chercheurs du monde entier, dresse un portrait saisissant d’un paysage dominé par de vastes prairies, laissant entrevoir l’interaction complexe de la vie qui a prospéré dans cette région à l’époque du Plio-Pléistocène (il y a environ 5,3 millions d’années). Cette recherche marque une avancée significative dans notre quête pour percer les mystères du passé de notre planète, en fournissant des données cruciales pour reconstituer les anciens paysages qui ont été le berceau de l’humanité. « Il n’est pas très courant en paléontologie des bovidés de tomber sur un mystérieux crâne bien préservé. Même si le spécimen n’est pas complet, la découverte et la description d’une nouvelle espèce potentielle de buffle de petite taille sont vraiment intéressantes ! », explique Raphael.

Antidorcas de l'unité P de Kromdraai : (a) Corne droite d'un mâle (A. recki) en vue de côté et de face (KW 9995). (b) Corne gauche en vue de face et de côté (KW 11161). (c) Corne droite en vue de face et de côté (KW 10704). (d) Corne droite en vue de face et de côté (KW 9611). (e) Partie arrière du crâne (os occipital) (KW 10410). Échelle = 5 cm. Crédit : GENRE : DSI-NRF Centre d'excellence en paléosciences. Photographie fournie par le Dr Rapahel Hanon
Ces bovidés, membres de la famille des Bovidae, qui comprend les buffles, les antilopes et les gazelles actuels, servent de clé pour percer les secrets du passé. Leur diversité et leur abondance à Kromdraai offrent un aperçu des régimes alimentaires et des comportements des grands carnivores et de nos ancêtres. En tant que proies, ces animaux ont façonné les schémas de prédation de la mégafaune de la région et, par extension, ont influencé les stratégies de survie des hominidés tels que Paranthrope robuste et tôt Homo espèce.
Préférences en matière d'habitat et diversité des bovidés
La découverte d'espèces éteintes de gazelles telles que Gazelle gracile et la présence d'un buffle encore inconnu, étroitement lié à Syncerus acoelotus indiquent un environnement dominé par les prairies. Cette découverte est corroborée par des comparaisons avec d'autres sites du Plio-Pléistocène en Afrique du Sud, qui suggèrent que différentes espèces d'hominidés étaient associées à des habitats variés.
Alors que Australopithèque semblait privilégier les zones boisées et les environnements fermés et humides, au début Homo espèces ont été trouvées dans des zones adaptées aux conditions ouvertes et sèches. La diversité des bovidés associés à Paranthropesuggère cependant une grande adaptabilité environnementale chez ces hominidés. Raphael explique que cette recherche a été quelque peu difficile. « L’un des plus grands défis a été de reconstruire et de décrire le petit crâne de buffle (Syncerus sp.) pour l'identifier », dit-il.
« Le crâne a été découvert sous forme de dizaines de petits morceaux d’os brisés. Jean-Baptiste Fourvel et moi-même avons passé des heures à le réassembler pour pouvoir déterminer de quel type d’animal il s’agissait. Même après avoir réassemblé tous les morceaux, il était très fragile, donc difficile à manipuler et à identifier. Les fossiles du buffle africain sont rares, surtout en Afrique du Sud, il n’a donc pas été facile de trouver des informations pertinentes qui auraient pu nous aider à identifier le crâne », explique-t-il.

Crâne de petit buffle Syncerus sp. de l'unité P de Kromdraai : (a) Vue de face, (b) Vue de côté, (c) Vue de dessus du frontlet KW 9463. (d) Vue reconstituée du côté droit du crâne. Échelle = 5 cm. Crédit : GENRE : DSI-NRF Centre d'excellence en paléosciences. Photographie du Dr Raphael Hanon
L'importance de ces découvertes va au-delà de la simple identification d'animaux anciens. Les assemblages de bovidés de Kromdraai, avec leur mélange de taxons du Plio-Pléistocène ancien et du Pléistocène plus récent, offrent une fenêtre sur les paysages changeants de l'Afrique ancienne. Ces changements, enregistrés dans les os et les dents des bovidés, reflètent la nature dynamique des écosystèmes de notre planète et l'adaptabilité de la vie face aux changements de climats et d'habitats.
De plus, l'étude de ces fossiles fournit un marqueur chronologique pour le site, la biochronologie indiquant que l'unité P de Kromdraai s'est accumulée entre 2,9 et 1,8 millions d'années. Cette fourchette est cruciale pour comprendre la chronologie de l'évolution humaine dans la région, offrant des informations potentielles sur l'apparition de Paranthrope robuste et d’autres espèces importantes en Afrique australe.
Le site de Kromdraai continue de témoigner de la richesse du passé de notre planète, invitant les scientifiques et les passionnés à réfléchir aux liens complexes entre l’histoire de la Terre et nos origines. Raphael est impatient d’approfondir ses recherches scientifiques. « Je vais continuer à travailler sur la paléontologie et la taxonomie des bovidés à l’avenir. J’espère pouvoir mener une analyse plus détaillée de taxons spécifiques tels que les buffles ou les gazelles en Afrique du Sud. De nombreux sites paléontologiques et archéologiques ont livré une énorme quantité de matériel fossile de bovidés qui n’attend qu’à être étudié », dit-il.
L’étude a été financée par le Centre d’excellence en paléosciences Genus-DSI-NRF.