La pandémie grimpante de Covid-19 terrorise les analystes éco et fait basculer les cours de bourse. L’économie de marché aurait-elle trouvé son maître ?
Pour les économistes, les premières victimes du Covid-19 seront incontestablement les marchés financiers. Ce jeudi matin, s’est prolongée la panique financière galopante à Berlin, Rome, Londres Paris. Les places fortes de l’Union connaissent des baisses allant de 5 à 8 %. Les facteurs alarmants s’amoncellent : 75 % des entreprises américaines n’arrivent plus à s’approvisionner correctement en pétrole, le tourisme s’effondre, le marché des spectacles fait grise mine. L’emballement pousse même les grands acteurs économiques à injecter des fortunes en liquidités : les banques centrales mettent des milliards sur la table. Mais, malgré ces annonces, la crise ne semble pas prête à s’estomper. Serait-ce le début de la fin ?
Economistes au bord de la crise de nerf
Peter Dixon, économiste de la City londonienne ne cache pas son pessimisme. Dans une interview donnée à nos confrères du Monde le 9mars, il prévoit que « les Bourses pourraient baisser encore de 15 à 20 % ». L’analyste de la Commerzbank enfonce le clou : « Il n’y a pas de précédent à la crise du coronavirus. Personne ne sait exactement quelle sera l’ampleur du choc économique ni combien de temps celui-ci durera ». Arthur Jurus, le chef économiste de la banque privée Landolt & Cie ose toutefois la comparaison avec d’autres précédents de pandémies. « Si l’on regarde toutes les épidémies précédentes, telles que le Sras en avril 2003 et le H1N1 en avril 2009, les matières premières sont les actifs qui subissent à chaque fois les plus fortes baisses, car la Chine en est la plus grande consommatrice », explique le chercheur. En effet, le ralentissement des industries chinoises dues au Covid-19 paralyse les demandes et fait donc chuter les cours. L’Australie, le Chili et le Brésil, grands exportateurs de matières premières sont donc les victimes privilégiées de la pandémie. Une certitude semble faire consensus chez les différents laboratoires économiques, la prévision de croissance mondiale de 1 % a été revue à la baisse. Certains instituts comme celui de la Deutsch Bank la fixe à 0,1 %.
Des banques plus solides qu’en 2008
Le coronavirus vient-il redonner un second souffle à la crise de 2008 ? Les banques, elles, se sont préparées en conséquence. La plupart d’entre elles sont capables de se refinancer et se préparent à prêter aux entreprises. En effet, le plus gros risque pour elles est une vague de défaillance des sociétés en déficit de ressources ou de clients. Cette crise de confiance rappelle douloureusement la crise estivale de 2008. Terrifiées, les banques avaient alors resserré les crédits, étranglant l’économie mondiale. Aujourd’hui, les établissements bancaires semblent faire un pari inverse. La BCE, par exemple a fait le choix de continuer à baisser ses taux directeurs, un geste incitatif qui baissera cependant considérablement ses marges.
Cependant, tout comme en 2008, la crise des liquidités pourrait revenir pointer le bout de son nez. Le laboratoire d’analyse du groupe ING a publié ce vendredi une note alarmiste sur le sujet. Rappelons que la liquidité désigne ici la capacité d’une ressource (allant de la devise à un bien immobilier) à être écoulée (liquidée) sur un marché.
Les Etats craignent le krach
Le VIX s’affole, la finance tremble. Cet indicateur observe la confiance des investisseurs sur le marché économique mondial. La peur d’un emballement de la crise est palpable. On comprend donc la panique des Etats face à la crise et leur décision de prendre le problème à bras le corps. A la pointe de cet interventionnisme, l’Europe dirigée par Ursula von der Leyen qui a annoncé un plan d’investissement de 25 milliards d’euros. La présidente a déclaré : « nous devons utiliser tous les instruments à notre disposition pour que l’économie européenne survive ». La présidente Signe inquiétant, Angela Merkel s’est déclarée prête à revenir sur la loi d’airain du déficit zéro. « Il s’agit d’une situation extraordinaire, nous ferons ce qui est nécessaire (…) nous le ferons pour que nous puissions nous sortir de cette situation et, après coup, nous verrons ce que cela a signifié pour notre budget », a-t-elle suggéré en conférence de presse, ce mercredi 11 mars.Deux échéances sont attendues avec impatience, cet après-midi la BCE pourraient mette en place des mesures de soutien. Dans un second temps, lundi prochain se réunit l’Eurogroupe, où dix-neuf ministres des finances écouteront les projets de la commission européenne. Viendra le moment de prendre le coro par les cornes.
Même les survivalistes n’ont pas survécu |
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Le coronavirus aura même annulé… le salon du survivalisme prévu du 22 au 23 mars. Les survivalistes sont des citoyens élaborant de scénarios d’effondrement généralisé du système et se préparant en conséquence. Pour le sociologue américain Bertand Vidal, le survivalisme a été grandement influencé par la crise de 2008. Sur la plateforme Uzbek & Rika, il explique ainsi qu’ « avec la crise financière ou de la peur de la crise environnementale, ces imaginaires ont profondément changé […] Les peurs ont changé, et aujourd’hui tout le monde peut être touché par un problème économique, ou encore pire par un problème écologique ». Le survivalisme contemporain fait donc de la réaction aux dérives de l’économie de marché un élément central de sa philosophie. Ainsi une vaste littérature en faveur de l’autonomie économique a fleuri sur Internet ces dernières années. Nous pouvons y trouver des propositions à échelles de communauté comme la création de monnaies alternatives. |
Thibeau Gabriel
@ThibeauGabriel