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Aurélien Barrau et les chiffres de l’effondrement

Aurélien Barrau a échangé avec les élèves de SUPAERO, une école d’ingénieur à Toulouse, afin d’évoquer sa vision du monde, la question de l’effondrement qui arrive ainsi que notre mode de vie indésirable.

Aurélien Barrau et les chiffres de l’effondrement

Dans un premier temps, Aurélien Barrau a rappelé quelques chiffres qui devraient alerter le monde sur la situation catastrophique du monde.

Les chiffres essentiels de l’effondrement :

  • en moins de 25 ans, l’Arctique a perdu de quoi recouvrir la totalité des Etats-Unis de 50 cm d’eau
  • le méthane, 20 fois plus efficace que le CO2 en tant que gaz à effet de serre, apparaît dans les relevés satellites à cause des fuites industrielles
  • le niveau de désoxygénation des océans fait craindre des effets irréversibles pour les vivants concernés
  • 1 point lumineux sur 10 ou 15 dans le ciel serait un satellite
  • une nouvelle limite planétaire a été dépassée : la pollution chimique

La « boîte noire de la Terre » enregistre l’effondrement

Des scientifiques envisagent de mettre en place une boîte noire destinée à enregistrer méthodiquement l’effondrement de notre civilisation. Le but est de permettre aux survivants de comprendre les rouages de la catastrophe.

La boîte noire est installée sur la côte ouest de la Tasmanie, un endroit paisible notamment d’un point de vue géopolitique. Dans cette balise de données seront enregistrées des informations quotidiennes sur la façon dont l’humanité gère la lutte contre le dérèglement climatique.

Parmi les informations disponibles, les générations futures pourront trouver des relevés de températures à la surface de la Terre, la croissance de la population mondiale, l’acidification des océans, la consommation d’énergie et d’autres informations essentielles.

L’effondrement du vivant et la règle des 65%

Aurélien Barrau évoque dans sa conférence l’éradication du vivant sur la planète. Il cite notamment l’effondrement des populations d’insectes, de vertébrés et des représentants des arbres sur Terre.

  • 65% de la population d’insectes en quelques années
  • 65% des vertébrés en quelques décennies
  • 65% des représentants d’arbres en quelques millénaires

Pour l’astrophysicien, il s’agit d’une extinction massive qu’on devrait nommée extermination délibérée. Les écologues chercheurs appellent ce phénomène un anéantissement biologique global.

« L’écosystème Terre est en train de casser. [..] Il n’y aura pas de retour à la position d’équilibre (même si des efforts sont faits) ».

Seuil critique ou point de basculement

La Terre a peut être déjà atteint un seul critique, un point de basculement qui n’a rien à voir avec celui qui a permis l’existence des humains et celle des espèces avec lesquelles nous partageons notre planète.

Le militant écologiste cite notamment un organisme suédois spécialisé qui a identifié une cartographie des processus et équilibres globaux nécessaires à la vie sur Terre. Selon ces experts, la moitié des seuils de non renouvelabilité (lorsque la pression est plus grande que les ressources) est déjà atteinte.

Si le dérèglement climatique est un sujet désormais dans toutes les bouches, il ne reste qu’un aspect parmi beaucoup d’autres d’un problème plurifactoriel.

Parmi les marqueurs de cette instabilité croissante, on peut citer :

  • l’extinction de la biodiversité
  • la dégradation des sols
  • le dérèglement des cycles bio géo chimiques indispensables au vivant
  • l’acidification des océans

La technique comme solution à l’effondrement ?

Aurélien Barrau cite le spécialiste des risques systémiques, Arthur Keller, et évoque la nécessité de s’en prendre aux causes plutôt qu’aux conséquences.

« Il faut redéfinir nos valeurs et nos objectifs. Les astuces techniques n’ont aucun sens ni intérêt ! », explique l’astrophysicien.

La technique, si chère à une Silicon Valley déconnectée des réalités environnementales, n’échappe pas aux lois de la thermodynamique.

« On ne peut pas tricher avec les flux d’énergie. [..] Le monde est ainsi fait ».

L’effet rebond montre que les hausses d’usage surcompensent toujours les baisses de consommation à cause des couts d’extraction. Sans compter l’addiction au high-tech qui pousse certains pays pauvres à devoir arbitrer entre l’accès à l’eau potable pour leur population et utiliser l’eau pour l’industrie d’extraction des matières premières.

La fusion nucléaire : une catastrophe pour le vivant

L’autre solution avancée face à la question du carbone est la fusion nucléaire. En admettant que cette prouesse technologique fonctionne et permette d’obtenir une énergie presque infinie et presque propre, quelles seront les conséquences pour la planète ?

Pour Aurélien Barrau, il s’agirait d’une catastrophe car le problème vient de l’usage de l’énergie. Or aujourd’hui, elle sert à décimer les populations animales, dévaster les sols, massacrer les fonds marins et détruire les forêts.

« Si l’énergie est utilisée pour détruire la vie. La vie est morte avec ou sans émission de CO2 ».

La courbe des ressources et l’effondrement

Les deux instabilités majeures selon Aurélien Barrau sont notre mode de vie intenable sur le long terme.

« Notre mode d’être n’est pas tenable. [..] On le sait depuis le Club de Rome, la courbe de prélèvement est nettement au dessus de la courbe des ressources », explique Aurélien Barrau.

Cette situation est transitoire et la courbe de la consommation va forcément repasser en dessous de la courbe des ressources provoquant un effondrement violent. Le manque de préparation des gouvernements provoquera un retour brutal à la normale.

« Il ne faut pas s’attendre à une gentille Gaussienne » , indique l’astrophysicien.

Même si un atterrissage en douceur est exclu pour lui, Aurélien Barrau assure que nous ne savons pas encore comment « l’avion va se crasher ».

La pérennité d’un monde indésirable

Notre monde dans lequel nous vivons est-il souhaitable ? La pérennité ne rime pas forcément avec désirabilité pour l’astrophysicien.

L’auteur du livre, Le plus grand défi de l’histoire de l’humanité, prend comme exemple une dictature ou un régime raciste mais durable. Est-ce vraiment souhaitable qu’il soit temporellement maintenable ?

« Un réel où la sublimité foisonnante [..] céderait la place à une uniformité de béton, de flux Instagram, de gadgets connectés que les fous en costume appellent « progrès ». Il faut se poser la question. Ce monde là, est-ce que c’est ce qu’on veut ? »

En se détournant de la vie, l’humain est aliéné par la technique et les objets sans véritable valeur. Aurélien Barrau appelle les Hommes à revoir leurs fondamentaux pas en changeant de prisme mais en appliquant leurs valeurs.

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